Vitrail de Jean-Michel Folon

« Attrape pas froid aux yeux
Garde ton audace
Attrape pas foi en Dieu
S’il te menace… » (Lynda Lemay)

Mais ? Qui menace qui et d’où vient la menace ? Est-ce des hauts-reliefs des églises gothiques magnifiant, souverain, un dieu imaginaire de marbre sur son trône ou, au ras de la terre, de l’Enfant de Noël menacé, dans sa chair, d’une mort imminente par Hérode et ses sbires ?

Pour faire écho aux mots du chant cité plus haut, j’aime vagabonder en terre d’évangile où, après trente années vécues à exercer son noble métier d’homme, Dieu charpentier se lève et ne tient pas en place. Tout en marchant il parle, annonçant sans relâche que, contraire aux nuées d’un ciel inaccessible, le royaume de Dieu est au milieu de nous. Ses paroles ont le goût du pain qui se partage et de l’eau d’une source qui se boit à longs traits, pour redonner vigueur à nos êtres assoiffés de tendresse et de paix. La clarté de ses mots ne se module pas sur l’air de la menace, ou alors seulement lorsque, sévèrement, il fait taire sur les flots les violentes tempêtes déchaînant nos angoisses !

D’une parabole à l’autre, il est tout à la fois : fils de l’homme ou berger ; vigneron ou semeur ; maître parti au loin ou père guettant sans fin le retour de son fils. Il nous dit de son verbe franc et sans équivoque, qu’il faut aimer les autres comme l’on s’aime soi-même. Partout où il fait halte, il est tantôt perçu comme le Christ, le Sauveur, soit traité de Satan… et pour cause : il dérange, comme Dieu seul sait le faire lorsque le « bien paraître » étouffe le « par être » ! Il met tant de désordre dans nos « prêts-à-penser » et tous nos « prêts-à-croire », que pour ne pas cesser de rabâcher en chœur des dogmes implacables en bouchant nos oreilles à sa voix « Vie-vifiante », une seule issue possible pour qu’enfin il se taise : celle de le mettre à mort, de nos pieuses mains féroces et menaçantes.

En ce temps de Carême, c’est le refrain du chant placé dans mon en-tête que je vous offrirai, un peu comme une invite de Dieu en qui j’ai foi toujours, infiniment : « J’veux pas que tu maigrisses du cœur, en suivant des régimes de peur. »

Marie-Claude Pellerin - 4 mars 2019

Ecouter Lynda Lemay dans "Attrape pas froid aux yeux"